Description

Un pistolet de la catastrophe…

Quand je l’ai eu en main je me suis demandé ce que j’avais…en main. Il était dans un état parfait et d’une parfaire homogénéité, avec de belles plaquettes bois Walther typiques fin de guerre (à partir de fin 1944) mais sans marquages d’attribution, ni poinçons d’époque à part un minuscule poinçon d’épreuve allemand des années 60 en avant de pontet. Pas de mention de modèle ou de fabricant non plus. Même pas de mention de calibre ! Un muet. Jamais vu. La lumière est venue du numéro de série. On va y revenir.

On ne présente plus le Walther PP, créé spécialement pour les forces de police allemandes en 1929. “PP” veut d’ailleurs dire “Polizei Pistol” (Pistolet de Police).

Outre la seconde guerre mondiale, à la hanche des officiers et des pilotes allemands, en plus de la Krimpo et de la Gestapo, il a servi de nombreuses polices à travers le monde. Un standard.

Maitre Flingus a recensé très exactement 29 pays à travers le monde dont les polices et services spéciaux ont eu recours aux service du beau “Pépé”.

Parmi eux, outre les forces allemandes, on trouve les anglais du MI6 et les yankees du très secret MACV-SOG (Military Assistance Command, Vietnam – Studies and Observations Group), bras armé de la CIA, et peut-être le service le plus secret de l’Histoire de la CIA, chargé des opérations les plus sensibles en Asie et ailleurs lors de la guerre du Vietnam. Ce sont notamment eux qui créèrent de toutes pièces l’incident du Golfe du Tonkin qui permit officiellement aux USA de se déclarer attaqués par le Vietnam alors qu’il n’en était rien.

Au cinéma, en PP ou PPK, notre Walther armait James Bond dans “Dr No”, le tout 1er volet de la série. D’ailleurs, l’acteur Jack Lord qui joue le rôle de le copain CIA de James dans le film s’en fit offrir un, plaqué or avec des plaquettes d’ivoire, par son ami Elvis Presley.

Car c’est aussi une vedette de film notre “pépé”. Il apparait dans OSS117, le Caire nid d’Espion, Un Condé, Peur sur la Ville, La scoumoune,… Rien que pour le cinéma français. Et dans un peu plus de 140 autres apparitions au Grand Écran en tout.

Son raté le plus fameux (car ils sont rarissimes sur cette arme) est de s’être enrayé le 20 mars 1974, lors de la tentative d’enlèvement de la Princesse Ann d’Angleterre, fille d’Élisabeth II, et de son mari, le Capitaine Mark Phillips. Son porteur, le garde du corps James Beaton, dut alors s’interposer de son corps devant sa royale protégée tout en tentant d’arracher l’arme de l’assaillant. Ceci lui valu d’abord de s’en prendre trois (poitrine, abdomen et main). Et ensuite d’y gagner sa George Cross, la plus haute décoration possible pour acte de bravoure en dehors de la présence de l’ennemi en Grande-Bretagne. Il avait, par son action courageuse, empêché l’enlèvement. Hélas, le chauffeur du couple royal, et un journaliste qui passait par là, eurent moins de chance…

Accessoirement, c’est avec cette arme, arme personnelle car il l’affectionnait, chambrée en 7,65, que Adolf Hitler se donna la mort le 30 avril 1945.

Bref, cette arme a de très sérieuses références d’emplois …(au pluriel).

Et pour cause: petit (155 mm x 100 mm, pour un poids d’un peu plus de 500 g à vide), d’excellente prise en main, simple et double action, avec un chien externe spécialement étudié pour ne pas gêner la sortie d’une poche ou d’un étui, il fut doté à sa naissance de dispositifs innovants comme son chien apparent qui est désarmé lorsqu’on bloque le levier de sûreté (pas de départ intempestif si l’arme tombe même chien armé) et la possibilité de vérifier au toucher si une cartouche est déjà engagée dans la chambre, par un témoin de chargement faisant saillie à l’arrière de la glissière. Bref une arme filable et très bien étudiée.

Il en existe en 7,65 surtout et en 9 court (380ACP), un peu moins, et, plus rarement, en 22LR et en 6,35 Browning. 

 

Le notre est un très bel exemplaire en 7,65 browning en superbe état de conservation. Mais ce n’est pas tout.

Il est de fabrication Walther avec son code des fabrications de Guerre “AC” qui le “signe” ainsi que son beau bronzage de guerre d’origine à 100% comme intouché. Vraiment très beau même pour un fin de guerre.

Les plaquettes de bois sont typiques de la production fin de guerre à partir de fin 44. Elles sont en parfait état. Le chargeur est un bien beau chargeur de marque Walther mais post guerre. Un chargeur militaire d’époque, sans mention Walther justement, se trouve pour une 60aine d’euros.

Mais surtout, si c’est bien un PP et  que “AC” est bien le code fabrication Walther pour l’usine historique de la firme fondée en 1886 et située à Zella-Mehlis en Thuringe (est de l’Allemagne), où sont donc passés le marquage de fabricant ? Les aigles à roulette ? Et même, avec des petits “N” les aigles, s’il était civil ? La mention “sécurité/feu” en levier de sécurité? Et même la mention du calibre de l’arme ?

Réponse : nulle part et pour cause. C’est un enfant très très tardif, né dans la catastrophe de 1945 (pour eux). Un des tous derniers sortis de l’usine historique de Zella-Mehlis.

Walther n’a produit que 10.000 Walther PP en 1945 tous numérotés de 3802xx P à 3906xx P (contre presque 81.600 en 1944 !). Et notre arme porte le numéro de série 387 7XX P ce qui en fait une des 2900 dernières armes du modèle PP sorties de l’usine historique et peut-être même du sinistre camp de Neugamme où Walther avait un atelier d’esclaves…

Il est plus que probable que cette arme n’a pas eu le temps d’être réceptionnée voire même qu’elle ait été prise après la fin des combats dans les derniers lots restant en usine. C’est en soi une curiosité et le premier PP “Zella” que je trouve avec ces particularités.

L’usine Walther a été capturée le 6 avril 1946 par le Second Bataillon de Tanks de la 11 Division Blindée US. La prise de Zella-Mehlis a donné lieu à un des plus grands pillages d’armes de la guerre. Dantesque. Des dizaines de milliers d’armes y attendaient les vainqueurs. Les témoignages Us que j’ai retrouvé sur le net sont clairs. Tout le monde s’est servi et le trafic d’armes dans la région fut intense. Car à la différence du cas de Mauser pris en 45 par les français, les allemands n’avaient rien eu le temps d’enlever avant l’arrivée des alliés.

Il est assez probable compte tenu de son numéro de série très tardif que cette arme vienne de cette période de pagaille car elle vient directement d’Allemagne.

L’Usine de Zella-Mehlis se retrouvera in fine en zone soviétique et sera détruite. Après 1945 Walther renaitra de ses cendres à Ulm en Allemagne de l’Ouest. Et les PP seront marqués cette fois de Walther à Ulm. C’est d’ailleurs le moyen immédiat de reconnaitre les “après-1945” des autres.

Autre curiosité : cette arme n’a pas d’indicateur de chargement en zone arrière supérieure de culasse qui sont pourtant la norme chez Walther. L’orifice n’a même pas été percé.

Certes, ils étaient commandables comme cela. Cela se voit sur des exemplaires très précoces ou sur certaines commandes particulières comme celle pour la Police de Munich. Mais en ce qui concerne celui-là, j’y vois plutôt une simplification de production de fin de conflit.

Bref,une arme très intéressante historiquement.

Comme indiqué plus haut, l’arme est dans un état externe rare avec un bronzage d’origine intouché. Elle est dans un état mécanique impeccable avec un canon miroir miroir à belles rayure que je qualifierai de neuf.

In fine un Walther PP en 7,65 “classique” mais dans une fabrication rare qui raconte l’Histoire et dans un état plus qu’excellent. Quitte à avoir un PP, une des meilleurs pistolets de poche de l’Histoire, autant vous acheter un collector !

 

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